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Les errances juridiques du développement de la méthanisation au service de la transition énergétique : un exemple de la nécessaire ouverture du droit des énergies renouvelables au droit de l’environnement et de l’urbanisme Lien permanent vers ce document

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La transition énergétique ne peut avoir réellement lieu que si elle est appropriée par le plus grand nombre. Pour permettre cela, nos dirigeants semblent vouloir se reposer sur les mécanismes traditionnels du marché, afin de parvenir à une économie décarbonée, et à trouver de nouveaux débouchés économiques compatibles avec les limites écologiques de la planète (telle que la bioéconomie). Néanmoins, cette stratégie a montré ses limites. En effet, face à l’ignorance des individus sur les enjeux de la transition énergétique, le modèle du New Public Management prône une plus grande participation de ces derniers au financement de la transition énergétique. Tel est par exemple le principal moteur des aides du droit de l’énergie qui incitent les producteurs d’énergies, à investir dans la réalisation d’infrastructures de production d’énergies renouvelables. Or, le fait de permettre à quelqu’un d’investir de l’argent dans une activité n’a jamais permis de lui faire comprendre les enjeux de ce qu’il finance. L’exemple du conflit entre agriculteurs et habitants d’un territoire, autours de l’ouverture d’une unité de méthanisation agricole l’illustre bien. Il est donc nécessaire de revoir ce modèle, en ouvrant davantage le droit applicable à la méthanisation, et plus largement des énergies renouvelables, aux instruments de participation du droit de l’environnement, et de planification du droit de l’urbanisme, pour parvenir à un développement inclusif et territorialement cohérent de ces énergies. L’application systématique des principes d’information et de participation des individus à la prise de décision publique en matière d’installations de production d’énergie renouvelables permettrait non seulement d’éduquer les individus à la transition énergétique, et d’éviter ainsi les phénomènes de rejet social de ces installations, mais également d’élargir le nombre d’investisseurs potentiels pour financer ces installations. Toutefois, il faudrait toujours veiller à ce que le développement des installations de production d’énergies renouvelables n’aggrave pas la crise environnementale actuelle. Cela est d’autant plus vrai que, pour réussir le pari de la transition énergétique, environ chaque groupement de communes devrait pouvoir compter sur sa propre source d’énergie renouvelable. L’impératif de la protection de l’environnement exigerait donc également une reconnaissance et une protection des services écosystémiques présents sur le territoire, lors de l’implantation des installations de production d’énergie renouvelable. C’est pourquoi il est nécessaire de proposer des solutions pour permettre un développement inclusif, et territorialement cohérent du développement de la méthanisation. Il n’est pas affirmé que les mesures proposées en section 2 sont suffisamment abouties pour être appliquées tel quel. En effet, les effets de ces mesures sur la protection de l’environnement, l’aménagement du territoire, le développement économique n’ont pas été suffisamment analysées pour le permettre. Reste que l’ensemble des projections en termes de réchauffement climatique, et notamment les rapports du G.I.E.C, démontrent qu’il n’est plus le temps de se demander s’il faut agir, ou continuer de croire que la croissance économique dans un monde fini est toujours possible. Il faut donc se demander, pourquoi le législateur continue d’aller dans la mauvaise direction, pourquoi les représentants du peuple ne parviennent pas à prendre les bonnes décisions pour mettre en place la rupture des modes de vie qu’impose la transition énergétique ? Les réponses à ces questions sont multiples, mais parmi elles il en existe une qui, à l’étude des mécanismes de modernisation du droit de l’environnement notamment, semble prévaloir sur les autres : le changement de paradigme d’une production énergétique industrielle mondialisée, basée sur les énergies fossiles, à une production d’énergie territorialisée engendrerait une baisse de compétitivité de l’économie française, dans la course matériellement illogique à la croissance économique pratiquée à l’échelle internationale. 179 En effet, le législateur est le garant des intérêts de la nation. Or, dans la culture de la mondialisation, les intérêts des individus sont garantis par le marché qui, grâce au jeu de la libre concurrence doit permettre de répondre aux besoins des individus au prix le moins cher. Ainsi, plus le marché est développé, et plus il existe de biens et de services à dispositions des consommateurs pour satisfaire leurs besoins à un prix compétitif. Les opérateurs du marché eux y trouvent leur compte grâce aux revenus qu’ils touchent de la vente de biens et services sur le marché, mais également en se partageant des parts de marché, qui tendent à l’augmentation en période de croissance économique. Toutefois, cette vision du système politique est trop simpliste pour fonctionner, car elle suppose que la production de biens et de services est infinie sur le long terme, et entraîne ainsi une destruction des équilibres environnementaux qui sont essentiels à la survie de l’Homme, mais également à la durabilité de l’économie elle-même. De plus, cette vision rabaisse les citoyens de l’Etat à de simples consommateurs, ou au mieux à des investisseurs potentiels. Face à cette spirale dans laquelle est prise l’ensemble des institutions nationales, européennes, et internationales, il est urgent de permettre le développement d’une économie territorialisée, et participative. Malheureusement, la culture institutionnelle française n’est pas assez ouverte à la démocratie participative pour permettre l’avènement d’une telle économie. Un premier pas vers ce nouveau modèle serait donc de lever les verrous de l’ouverture de la démocratie représentative à la démocratie participative, et de favoriser l’éducation à l’environnement des individus. Par ailleurs, une économie territorialisée, supposerait que les acteurs économiques prennent conscience de la nécessité de rationnaliser l’exploitation des ressources présentes sur le territoire, pour en assurer la durabilité. En d’autres termes, il est nécessaire que les pouvoirs publics garantissent la primauté de la protection de l’environnement territorial, comme source de services écosystémiques irremplaçables, vis-à-vis de la croissance économique. Or cela conduirait nécessairement à une restriction de la liberté du commerce et de l’industrie, ainsi qu’à une réduction de la liberté d’entreprendre, qui sont les deux piliers du libre marché, auquel le législateur accorde la plus grande importance. En revanche, cela conduirait parallèlement à permettre aux individus de prendre le relais de ces grandes industries pour continuer à assurer les besoins fournis par le marché. Il existe donc deux besoins, qui au regard de leurs caractéristiques semblent être complémentaires : d’une part la participation du plus grand nombre à la transition énergétique et écologique, et d’autre part, le relais des grandes industries dont le maintien est incompatible avec la survie à long terme de l’espèce humaine dans les limites écologiques de la planète. Or, l’étude de la symbiose en biologie montre que lorsque deux organismes ont des besoins complémentaires, leur survie n’est assurée que par leur collaboration. Il serait donc nécessaire d’allier enfin le besoin de participation des individus à la transition écologique et énergétique, à la transition économique rendue nécessaire par la crise environnementale. Ainsi, si le droit a bien pour fonction de régir les interactions entre les différentes composantes de la société, alors il désigne l’outil privilégié pour mettre en oeuvre, ou plutôt permettre cette transition. Toutefois, il est illusoire de penser que les évolutions législatives nécessaires pour parvenir un développement inclusif et territorialement cohérent des énergies renouvelables pourrait advenir en une seule réforme. Il faudra du temps au législateur pour se rendre compte que la symbiose ci-avant exposée est la seule voie de salut pour tant pour la survie de l’Etat, que pour la survie de son économie. Néanmoins, le législateur a déjà commencé cette transition, avec la reconnaissance du droit de participation citoyenne, de la planification territoriale, des coopératives économiques, du classement des réseaux de chaleur. 180 Cependant la mise en oeuvre de ces outils se heurte à une faible volonté politique, couplée à une forte résistance des actuels acteurs économiques, qui pourraient perdre des millions dans cette transition. La déviation du principe d’écologie industrielle et territoriale, vers un instrument au service de la simplification administrative illustre bien ce problème. Il est donc de la responsabilité de tous ceux qui n’ont pas voix au chapitre, c’est-à-dire de ceux qui n’ont pas d’intérêt au maintien de l’économie industrielle mondialisée, de provoquer la transition vers une économie territorialisée et environnementalement cohérente. La réunion de tous les habitants d’un territoire au sein d’associations, et de coopératives n’est pas seulement une solution au développement des énergies renouvelables, mais elle est également une condition permettant à tout un chacun de sortir de la conception réductrice actuelle des citoyens en tant que simple consommateur, et de devenir un véritable acteur de la transition énergétique et écologique des territoires. Créé par Julien Mongrolle 21 nov. 2019 Version 0.1
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