Tumeurs cutanées avancées et historiques, pourquoi un retard de prise en charge ? : étude épidémiologique menée en Haute-Vienne et départements limitrophes

Discipline

Dermatologie et vénéréologie

Classification

Médecine et santé

Mots-clés

Peau -- Cancer - Thèses et écrits académiques,

Retard de diagnostic - Dissertation universitaire,

Diagnostic précoce - Dissertation universitaire,

Télémédecine - Thèses et écrits académiques

Introduction : Le terme de « tumeur historique » désigne une tumeur digne d’être conservée dans l’histoire et résulte d’un retard de prise en charge. L’objectif de l’étude était d’étudier des facteurs médicaux, épidémio-sociaux, et géographiques associés aux tumeurs cutanées dites avancées ou historiques. Matériel et Méthode : Il s’agissait d’une étude descriptive, observationnelle rétrospective et monocentrique. Elle était menée chez des patients pris en charge pour des lésions tumorales cutanées avancées ou de tailles supérieures à 5 cm dans le service de dermatologie du CHU de Limoges, de Mai 2014 à Mai 2019. Résultats : 43 tumeurs cutanées ont été identifiées, 38 étaient dites avancées, 35 historiques et 30 avancées et historiques. Les caractéristiques des patients retrouvaient un âge moyen de 80 ans, 24% avaient un trouble psychiatrique, 90% n’avaient aucun diplôme, 26% vivaient en situation d’isolement familial, 14% en institution, 77% en milieu rural. 30% des patients étaient décédés aux dernières nouvelles. La durée d’évolution des tumeurs était estimée à 34 mois en moyenne. Seulement 6,5% des tumeurs ont bénéficié du traitement de référence. Le mode de découverte le plus fréquent était l’intervention du médecin généraliste. La durée d’évolution des tumeurs semblait moins longue lorsque le médecin avait bénéficié d’une FMC dermatologique durant les dix dernières années. Discussion : Des facteurs intrinsèques aux patients, aux tumeurs, et aux médecins peuvent expliquer en partie le retard de soins : la présence de troubles psychiatriques, un niveau d’étude faible, un âge moyen élevé, une situation d’isolement familial. Le pourcentage élevé de tumeurs localisées en zones dites socialement exposées, tel le visage ou les mains, calculé à 56% dans notre étude, témoigne d’une probable auto-négligence du patient, ou d’une négligence de la part du personnel médical. La géolocalisation des patients inclus dans notre étude corrobore la typographie d’inégalités socio sanitaires en Nouvelle Aquitaine, principalement en Creuse, au centre et au nord de la Corrèze, à l’Est de la Charente, en zones rurale de la Haute Vienne, et au nord de la Dordogne. Ces bassins ruraux, présentent une densité médicale faible, des délais de consultations en dermatologie long (jusqu’à 70,5 jours en Creuse), un indice d’APL élevé (calculé à 3,77 dans notre étude, témoignant d’une médecine de proximité limitée), un taux de pauvreté élevé, et peu d’intérêt pour les opérateurs en télécommunications : 51 zones blanches sont identifiées en Nouvelle Aquitaine source de fracture numérique. Conclusion : Ces patients devraient donc être la cible principale des futures campagnes d’informations et de dépistage en dermatologie. Ces territoires devraient être au centre des futurs programmes de prévention et de sensibilisation en dermatologie, ainsi que d’investissement en technologie moderne, telle la télémédecine. Le registre des tumeurs cutanées avancées et historiques du CHU de Limoges se poursuit, et un travail ultérieur, d’une puissance supérieure permettra de confirmer nos résultats.